Bonjour Carole,

Merci de participer au premier Zoom Expert de Nicomak. Vous êtes experte diversité. Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?

J’ai eu un parcours assez classique. Après mon bac ES, j’ai fait 4 ans d’études de droit et je me suis orientée en 3ème cycle vers le droit social et la gestion des Ressources Humaines (RH), ce qui m’a conduit vers mon premier poste dans un service RH.

Après 15 ans de carrière dans la fonction RH, au sein de diverses organisations publiques et privées, j’ai décidé de créer mon cabinet. Je voulais être plus proche des femmes et des hommes de l’entreprise. J’ai donc décidé de me former au coaching, à la communication, aux profits de personnalité etc.

Pourquoi la thématique du genre vous a-t-elle attiré ?

La question de la place de la femme en tant que cadre dirigeante et manager est une thématique qui est revenue souvent dans les coachings que l’on m’a confiées. Cela m’a interpellée et j’ai décidé de m’y intéresser. Il y a de plus en plus de prises de conscience sur cette question (rapports sociaux, plans gouvernementaux, réglementations etc.) mais la question est loin d’être résolue. Cela reste un sujet d’actualité.

Pourquoi parle-t-on de « leadership féminin » ? En quoi le leadership féminin diffère-t-il du leadership masculin ?

Il y a beaucoup de modules de formation sur cette thématique aujourd’hui. La question que l’on pourrait se poser c’est plutôt : y a-t-il vraiment un leadership au féminin ? Si on regarde réellement le déroulement des réunions de carrière pour nommer les cadres, on se rend compte que de vieux stéréotypes perdurent sur le profit féminin. Les femmes seraient plus maternelles, plus douces, plus bienveillantes etc. Mais il existe des femmes qui ne sont ni douces, ni bienveillantes, ni maternelles tout comme il y a des hommes doux, bienveillants et paternels. Au contraire, il y a de nombreuses qualités que les hommes et les femmes partagent.

On revêt les hommes d’un potentiel managérial beaucoup plus fort. A priori, les hommes seraient plus managers que les femmes, ce qui n’est pas toujours vrai. C’est une croyance sociétale sur laquelle il faut batailler. Il faut faire tomber ces stéréotypes. Il serait mieux de parler du leadership en général. Selon moi, on n’est pas leader on le devient. Le leadership ça se développe si on s’en donne les moyens, chez les hommes comme chez les femmes. Les femmes qui arrivent à des postes de hauts niveaux au sein des organisations sont surtout des femmes qui ont été coachées, mentorées par des femmes, elles-mêmes cadres dirigeantes, qui leur ont fait prendre conscience qu’elles étaient « capables de ». Beaucoup de femmes n’ont pas conscience des atouts et des compétences qu’elles ont au départ. J’ai cependant remarqué qu’il y a une rupture générationnelle. Les femmes de moins de 35 ans ont plus de facilité à prendre le leadership tandis que les femmes un peu plus âgées laissent plus facilement leur place à des hommes.

Quelles sont les évolutions majeures que vous avez pu constater ces 5 dernières années concernant la place de la femme dans l’entreprise ?

Aujourd’hui on voit de plus en plus de femmes à des postes à responsabilités et de management, ce qui n’était pas le cas il y a une vingtaine d’années.  Cela paraissait naturel que les hommes soient aux commandes. Même dans les familles ou dans l’enseignement (on voyait plus de directeurs que de directrices). Là aussi, c’est en train de changer.

Cependant les femmes sont encore souvent cantonnées à des postes dits « féminins » : responsables ou directrices marketing, communication, RH, RSE.  Dans la composition des CODIR on voit encore peu de femmes aux fonctions finances, achats, stratégie, qualité etc. Après il faut différencier les grands groupes aux petites organisations pour lesquelles c’est moins vrai.

En quoi la parité est une stratégie vertueuse pour les organisations ?

Pour que la parité soit une stratégie vertueuse, il faut que cela soit une parité à tous les niveaux. Pas uniquement au niveau de la direction sinon cela ne fera pas bouger l’organisation. Si la parité est partout c’est possible, ça permet aux jeunes femmes d’y croire en de disant « oui c’est possible, moi aussi je peux le faire ». On élargie le cadre des références et des possibles.

Est-ce que vous souhaiteriez rajouter quelque chose ?

J’aurais souhaité parler du sexisme. Aujourd’hui il y a une forme de sexisme « rampant ». Avant il était brutal. Aujourd’hui c’est plus politiquement correct, donc plus ambivalent. Il y a deux choses qui m’interpellent. La première, c’est la façon dont on écoute les femmes. Les voix féminines portent souvent moins. Quand vous êtes une femme, il est montré qu’on vous coupe plus la parole. Il faut prouver que vous avez de la valeur pour qu’on vous écoute. Il faut faire ses preuves. On porte moins d’attention à vos propos si ce n’est pas le cas. La deuxième chose qui m’interpelle c’est l’importance que l’on accorde à l’apparence. On attend d’une femme qu’elle soit jolie, maquillée, coiffée etc. Le regard sur la tenue de la femme fait partie des attendus. Pour un homme ça ne sera pas point d’attention. Or le fait de sentir que les gens vous regarde peut vous conduire à ne pas forcément prendre toute la place que vous devriez prendre car c’est gênant pour vous. Cela peut-être minimisant et amener les femmes à laisser leur place aux hommes. Il faut apprendre à se défaire du regard des autres. Il faut être vigilant sur ce sexisme masqué qui est toujours présent dans notre société. Il y a encore du chemin à faire mais c’est important de le faire et d’en être conscient. L’évolution passe par les mentalités des hommes et des femmes. On a besoin du regard des hommes pour avancer. Il faut élargir les perceptions. On demande très peu aux hommes leurs perceptions sur le sujet or on a besoin que les hommes prennent la parole.

Merci d’avoir répondu à nos questions !